27 août 2008
L’association de défense des consommateurs Que Choisir publiait en décembre 2004 un document édifiant sur la nocivité des
désodorisants d’intérieur, dont l’intitulé était pour le moins explicite : « Polluants d’ambiance ». Anticipant une appréhension légitime de leur clientèle, la réaction des
industriels commercialisant les produits incriminés ne s’est pas faite attendre. Arguant être en conformité avec la « réglementation en vigueur », ce qui aux dires de
l’association ne représente pas de défi majeur étant donné qu’il n’existe pas de règlement relatif aux émissions de polluants des produits proposés à la vente, les fabricants se sont engagés à
fournir à leurs clients une meilleure transparence via leur « programme de gestion responsable ».
Malgré cette bonne volonté affirmée, les progrès sont loin d’être convaincants comme en témoigne la
nouvelle étude publiée dans le numéro de septembre du magazine Que choisir. Sur les 39 produits testés issus d’enseignes diverses dont les célèbres Air Wick, Brise, Oust, Febreze et Ambi Pur,
seuls 9 ont été jugés « acceptables ».
Représentatifs de la diversité du marché actuel, les articles examinés comprennent 9 produits de combustion, 10 aérosols,
11 diffuseurs électriques, 6 diffuseurs prêts à poser, deux huiles essentielles et un extrait de parfum. Pour mettre en évidence des traces de composés organiques volatils (COV), semi-volatils et
très volatils, chaque désodorisant a été placé dans une chambre en plexiglas d’une contenance de 28 litres.
Des cartouches absorbantes installées en sortie de la chambre étaient chargées d’identifier et de quantifier les
émissions polluantes piégées. Les relevés ont débuté au terme de deux heures de fonctionnement en ce qui concerne les diffuseurs électriques et prêts à poser ainsi que les bougies, de 15 minutes
après les pulvérisations de cinq secondes pour les aérosols, les vaporisateurs et les mini-sprays. L’attente a été prolongée à une heure pour les huiles essentielles et l’extrait de parfum
employés avec un brûleur.
Le seuil de référence au-dessous duquel la qualité de l’air est considérée de « bonne qualité » a été fixé à 200 µg/m3. Bien que les industriels l’aient jugé excessif, ce quota
s’applique à un seul produit, chacune des références étant étudiée dans une chambre différente pour éviter toute contamination d’une expérimentation à l’autre.
Les résultats sont sans appel. Parmi les multiples polluants rejetés, on a détecté la présence de substances classées cancérigènes dont le formaldéhyde décrit comme le plus préoccupant des
« polluants hautement prioritaires » par l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur. Outre des réactions allergiques de la peau, des yeux et des voies respiratoires, il est
impliqué dans plusieurs types de cancers, notamment ceux de la cavité buccale, des fosses nasales et des sinus. Or, on a dépisté la présence de ce gaz dans certaines bougies, telles l’Occitane
parfumée à la cannelle orange et la version Italian festival de Brise Huiles parfumées. L’encens japonais de la marque Encens du monde et celui « fruits confis » de l’Occitane ont
également été testés positifs au test du formaldéhyde.
Autre COV comptant parmi les plus redoutés, le benzène a lui aussi été décelé après l’utilisation de quelques produits, dont la déclinaison vanille et caramel de la Lampe Berger. Bien que présent
en faible quantité, celui-ci représente une réelle menace, étant impliqué dans certains cas de leucémies et de lymphomes.
Si ces deux composés chimiques font partie des plus nocifs, de nombreuses autres « substances aux effets connus ou suspectés » ont été mises en évidence comme l’acétaldéhyde, classé
cancérigène possible par le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer) et le toluène, décrit par l’association comme un « neurotoxique puissant ».
Bien qu’à l’origine d’un recul des ventes en 2004, ces résultats alarmants n’ont pas pour autant freiné les ardeurs des fabricants, bien au contraire. Minimisant les risques encourus, certains
sont même allés jusqu’à attribuer des vertus assainissantes à leurs désodorisants. C’est le cas d’Ambi Pur qui vante sa gamme Puresse comme « hypoallergénique », cette dernière ayant
été reconnue comme émettrice de limonène (1).
Mais ne s’appliquant qu’à la peau et non aux voies respiratoires, comme le souligne Que Choisir, cette protection
hypoallergénique serait sans doute plus utile s’il s’agissait d’un déodorant corporel. D’autres innovations ont suivi, à l’image des destructeurs d’odeurs devenus articles phares des marques Oust
et Febreze. Pourtant, outre le fait qu’ils ne détruisent pas les molécules odorantes à éliminer, ils introduisent une quantité non négligeable de COV.
Si vous espériez trouver une alternative honorable du côté des produits « naturels », là encore, force est de reconnaître que les promesses ne sont pas tenues. Terme éminemment
équivoque, nous entendons ici par « naturels » soit des produits se réclamant à 100 % naturels, soit des formules « à base d’huiles essentielles » ou encore des articles
vendus dans des magasins bio. Au total, 10 produits dits « naturels » ont été inclus à l’étude. Exemple parmi d’autres, le vaporisateur Phytaromasol, promu comme « composé d’huiles
essentielles 100 % pures et naturelles », semble atteindre un niveau de pollution « record » avec des « émissions de limonène et d’alphapinène très élevées ».
De même, Que Choisir invite à se méfier du crédit habituellement accordé aux huiles essentielles. Annihilant les
bienfaits généralement attribués à celles-ci, l’association huiles et flamme génère une pollution très importante, diffusant des compositions cancérigènes.
Loin de remplir leur fonction première, à savoir l’assainissement de l’air intérieur, les désodorisants d’intérieur en
viennent à avoir l’effet inverse, exposant les habitants des lieux à des substances nocives. Pour preuve, qu’il s’agisse d’organismes de protection de consommateurs ou des fabricants eux-mêmes,
tous conseillent de « Bien ventiler après usage » et de « Ne pas respirer les aérosols ». Dès lors, quel intérêt de recourir à ces produits s’il est nécessaire d’en annihiler
les effets immédiatement après leur utilisation ? Une interrogation qui devrait trouver un large écho alors que ces petits gadgets poursuivent les acheteurs jusque dans l’habitacle de leurs
voitures…
Cécile Cassier
1- Molécule irritante naturellement présente dans le citron.
Commentaire de Gilles Fournil
Il convient donc de diffuser les huiles sans les chauffer.